Les ministres des Finances de la zone euro (Eurogroupe) ont dénoncé mardi soir les augmentations de salaires « scandaleuses » que s’attribuent certains dirigeants d’entreprises et envisagent de prendre des mesures fiscales pour contrer ce phénomène.
« Nous pensons que les dérapages excessifs sur les salaires que nous avons pu observer dans plusieurs pays sont proprement scandaleux et regardons quels moyens (utiliser) pour lutter contre ces excès là », a déclaré le président de l’Eurogroupe, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker à l’issue d’une réunion du forum à Bruxelles.
Les pays européens envisagent en particulier d’imposer fiscalement les primes de départ versées sous différentes formes aux dirigeants qui quittent leurs fonctions, telles que les « golden handshake » (poignée de main dorée) et autre « golden parachute » (parachute doré), a-t-il ajouté.
En règle générale, ces primes sont aujourd’hui non imposables car présentées comme des frais généraux, a précisé M. Juncker, qui a dénoncé un véritable « fléau social ». Les pays de la zone euro suivraient en cela l’exemple des Pays-Bas qui sont les premiers en Europe à avoir pris des mesures de ce type.
Les parachutes dorés et autres primes de départ importantes doivent être ainsi taxés dans ce pays à hauteur de 30% pour les personnes dont le salaire annuel dépasse les 500.000 euros, à condition que la prime soit supérieure au salaire annuel. « Nous courons le risque de ne plus être compris par nos concitoyens si nous leur adressons d’un côté des appels incessants à la modération salariale » pour freiner l’inflation et que de l’autre les chefs d’entreprise font l’inverse, a argumenté M. Juncker.
« Il n’est plus acceptable qu’un certain nombre de dirigeants bénéficient de parachutes dorés sans relation avec les performances mesurables » de leurs sociétés, a ajouté le ministre des Finances et Premier ministre luxembourgeois.
Tous les pays de la zone euro ont été invités à faire connaître à la Commission ce qu’ils font déjà ou envisagent de faire pour lutter contre « ces comportements extravagants ». Le sujet doit concerner toute l’Union européenne et, au-delà, « une action internationale s’impose », selon M. Juncker. « Nous voudrions que l’UE donne l’exemple et entraîne les autres », a ajouté M. Juncker.
Le sujet suscite des polémiques récurrentes en Europe, d’autant que le pouvoir d’achat des salariés tend lui à se tasser, voire à baisser du fait de l’envolée des prix. La Belgique songe depuis peu à plafonner les salaires des patrons des sociétés publiques. Une décision prise après une controverse autour des émoluments du PDG de l’opérateur Belgacom, Didier Bellens, augmenté de presque un million d’euros l’an dernier.
En Allemagne, le parti social-démocrate, membre de la coalition au pouvoir, entend aussi proposer des mesures incitatives pour limiter les salaires des grands patrons. Les salaires du directoire du groupe Daimler, par exemple, ont bondi de plus de 45% l’an dernier, année du divorce entre le constructeur automobile allemand et l’américain Chrysler.
Et les revenus de Josef Ackermann, le patron de la première banque allemande Deutsche Bank, se sont élevés l’an dernier à 13,98 millions d’euros.
En France, selon une étude publiée en début d’année près de trois patrons sur quatre de grandes sociétés françaises ont gagné 40% de plus en 2007 qu’en 2006.
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